El tema central de este Blog es LA FILOSOFÍA DE LA CABAÑA y/o EL REGRESO A LA NATURALEZA o sobre la construcción de un "paradiso perduto" y encontrar un lugar en él. La experiencia de la quietud silenciosa en la contemplación y la conexión entre el corazón y la tierra. La cabaña como objeto y método de pensamiento. Una cabaña para aprender a vivir de nuevo, y como ejemplo de que otras maneras de vivir son posibles sobre la tierra.

jueves, 15 de septiembre de 2011

Vivre dans une cabane au bord du lac Baïkal

Bivouac sur les rives du lac Baïkal (Russie)
Année 2005
© Thomas Goisque

(...) Pour rassasier son besoin de liberté, Sylvain Tesson a trouvé une solution radicale: s’enfermer dans une cabane en pleine taïga sibérienne, sur les bords du lac Baïkal, pendant six mois. De février à juillet, il a choisi de faire l’expérience du silence, de la solitude, et du froid.

« Le défi de six mois d’ermitage, c’est de savoir si l’on réussira à se supporter. En cas de dégoût de soi, nulle épaule où s’appuyer, nul visage pour se lustrer les yeux. Vivre en cabane c’est l’expérience du vide ! »
En filmant presque quotidiennement ses impressions, ses joies et ses peines face à la splendeur du lac, ses doutes, mais aussi, ses moments d’extase, de paix intérieure et d’osmose avec la nature, Sylvain Tesson nous fait partager un rêve enraciné dans l'enfance, l'expérience d'une transformation intérieure. « La vie en cabane apprend à peupler l’instant, à ne rien attendre de l’avenir et à accepter ce qui advient comme une fête. Le génie du lieu aide à apprivoiser le temps. »
Un film de Sylvain Tesson et Florence Tran
Une production Bo Travail! (...)




Sylvain Tesson : "La France est un paradis peuplé de gens qui pensent vivre en enfer"

Sylvain Tesson : "La France est un paradis peuplé de gens qui ont l'impression de vivre en enfer" (13/09/2011)


Après un tour du monde à vélo, une traversée de l’Asie centrale à cheval et un périple de huit mois sur les traces des évadés du goulag, Sylvain Tesson, écrivain aventurier et voyageur, rêvait d’une vie en ermite au bord du lac Baïkal. Parti en février 2010 armé de dix-huit bouteilles de ketchup et d’une bonne caisse de livres, il l’a fait, et a passé six mois dans une petite bicoque de 9m² à cinq jours de marche du village le plus proche.

Plus d'un an après, il publie Dans les forêts de Sibérie (Gallimard), est sélectionné pour le Renaudot, et raconte le silence, la vodka, le froid, le bonheur, le désespoir, les saisons qui passent et sa métamorphose dans un carnet de bord à l’image de ces six mois de "réclusion volontaire" dans l’immensité russe, un peu fou et hors du commun. Rencontre avec l’auteur.

MyBOOX : D’où vous vient cette fascination pour le lac Baïkal et comment vous est venue l’idée de cette "réclusion volontaire" ?

Sylvain Tesson : J’ai découvert le lac Baïkal en 2004 alors que j’effectuais un voyage sur la route des goulags. Je suis arrivé là, et j’ai eu l’impression de voir le plus beau paysage que je n’avais jamais vu de ma vie. C’était fascinant, le ciel reflétait la lueur d’un lac mais ce lac avait la dimension d’une mer. Il y avait dans ce paysage quelque chose qui m’a sauté à la gorge, un saisissement. Puis j’ai rencontré quelques ermites, il y avait chez eux de la folie, de l’ivresse et tellement de bonheur, une immense paix intérieur. C’est là que je me suis dit qu’il fallait que je fasse un jour l’expérience de la cabane. Une expérience qui me permettrait d’apprivoiser le temps par le silence, et non plus seulement en abattant des kilomètres.

MyBOOX : Vivre en ermite pendant six mois dans une cabane de 9m² perdue en pleine Sibérie, ce n’est pas un acte anodin…

Sylvain Tesson : L’ermitage est une dénonciation en creux, on fait un pas de côté, se retire de la société. C’est une démarche dont j’assume totalement le côté individualiste. On opère une simplification, un resserrement autour de quelques lieux, quelques êtres, c’est tout ce contre quoi nous sommes éduqués dans les villes où l’on nous demande d’être un terminal informatique, une base de données. Là, on accepte de ne connaître qu’un petit nombre de personnes, de lieux, et on refuse la fébrilité dans laquelle nous plonge la société moderne, on fait retomber la fièvre.

MYBOOX : Quel était le but de ce voyage ? Aviez-vous déjà en tête l’idée de ce carnet de bord ?

Sylvain Tesson : Oui. Je voulais écrire sur le temps. Pour cela, je voulais m’éloigner des mots de notre culture européenne, de cette fébrilité dans laquelle nous sommes plongés, de cette folie urbaine postmoderne. Il fallait que je m’isole du monde pour écrire sur cette thématique. Ce que je fuyais c’était le rapport que nous avons au temps dans nos sociétés contemporaines. Ici on voit le temps comme un ennemi, un ennemi à combattre que l’on essaye de maîtriser en le découpant, le séquençant, l’organisant.


MyBOOX : Vous êtes un voyageur, un aventurier et un écrivain, quelle place l’écriture occupe-t-elle dans votre vie ?

Sylvain Tesson : L’écriture c’est une des rares activités – avec le vélo et la marche – qui me permet de ne pas ressentir avec angoisse la fuite du temps. Quand on écrit, il y a une sorte de flottement. Et puis l’écriture c’est le prolongement de l’aventure. C’est vrai, après tout, on commence à écrire pour les mêmes raisons qui nous poussent à voyager : parce que l’on trouve que la vie ne nous suffit plus.

MyBOOX : Vous parlez de l’écriture comme d’un remède qui vous permet d’oublier le temps qui passe, d’où vous vient cette angoisse de la fuite du temps ?

Sylvain Tesson : Dans nos sociétés, quand on est un jeune urbain de quarante ans sans combat, on est bombardé d’envie de tout voir, comme une indigestion de tout connaître et on se dit qu’on n'aura jamais le temps. On sent ce temps qui nous échappe, passe trop vite, que l’on ne parvient pas à saisir et il y a ce train qui fonce vers la mort.

MyBOOX : Ces six mois au bord du lac Baïkal vous ont-ils aidé à dompter cette angoisse ?

Sylvain Tesson : En partant, je voulais ne plus sentir cette fuite du temps. L’ennui densifie le temps. Alors que six mois passés à Paris m’auraient paru une trainée de poudre, ces six mois de cabane m’ont semblé une vie. Il y a eu comme une dilatation du temps. En voyageant c’est comme si je m’offrais plusieurs vies, comme si je vivais plein de petites existences toutes distinctes les unes des autres.

MyBOOX : Dans le livre, vous écrivez "Se sentir familier d’un lieu c’est le début de la mort", cette phrase illustre-t-elle une philosophie de vie ?

Sylvain Tesson : Pour moi l’habitude, le conformisme, c’est un cancer. Si je voyage autant c’est justement pour échapper aux habitudes et au confort. Je pense que ce besoin de tout assurer contamine les gens. Aujourd’hui, on préfère avoir une bonne compagnie d’assurance plutôt que d’apprendre à se débrouiller tout seul et à échapper au pire. Pour moi, le voyage c’est une façon de prendre ses responsabilités.

MyBOOX : Avec ce voyage, vous avez à nouveau vécu une expérience hors norme, vous sentez-vous porteur d’un message ?

Sylvain Tesson : Je ne voulais pas faire passer un message mais témoigner. Témoigner de ce sentiment de bonheur, de joie profonde que l’on a quand on s’extirpe de la servitude du temps et se réconcilie avec lui. Avec la technologie on s’est affranchi de l’espace, on parcourt le globe en quelques heures, on est puissant, mais le temps c’est la liberté.

MyBOOX : Ces six mois sibériens n’étaient pas votre premier voyage en Russie, c’est un pays que vous connaissez bien et où vous vous rendez souvent…

Sylvain Tesson : J’aime la Russie, et surtout son peuple. Il y a des choses qui me plaisent vraiment chez les Russes, notamment le fait qu’ils se fichent toujours du lendemain, et leur capacité à l’excès, leur générosité, leur rugosité et leur placidité par rapport à la facilité avec laquelle nous, nous perdons patience. En Russie, il y a une grande violence mais pas d’agressivité, en France les gens n’ont pas de nerf. Et puis j’aime l’immensité de ce pays. Nous, où que l’on soit, si on fait dix kilomètres on tombe sur une route, on vit dans un jardin, eux ils ont l’immensité. Quand vous avez l’immensité, l’espace, vous avez tout, pour moi c’est vraiment le pays de la liberté.

MyBOOX : Quel regard portez-vous sur la France ?

Sylvain Tesson : Je regarde la France comme un paradis peuplé de gens qui ont l’impression de vivre en enfer. Je ne suis pas du tout dans le rejet mais c’est vrai que ce mode de vie un peu assoupi, un peu morose, ce manque de nerf m’agace un peu et me donne envie de me casser dans les steppes.
Propos recueillis par Emma Aurange





http://youtu.be/0dCNHIfQu1k
http://www.transboreal.fr/auteurs.php?id=7
http://www.grandbivouac.com/festival-2011/programme/conferences/6-mois-de-cabane-au-baikal
http://www.myboox.fr/actualite/sylvain-tesson-la-france-est-un-paradis-peuple-de-gens-qui-ont-l-impression-de-vivre-en-en

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